La relation sacrée entre les serpents et les Aïssaouas.

les serpents venimeux, non venimeux, d'Europe et d'ailleurs.
Kodiak

La relation sacrée entre les serpents et les Aïssaouas.

Message par Kodiak »

Bonjour, à la demande de Pierre-Yves, j'ouvre le sujet sur les Aïssaouas.

L'origine des Aïssaouas remonte à 4 siècles, à l'origine Sidi Mohammed Ibn Aïssa fondateur de la confrérie des Aïssaouas au XVI siècle.
Ce mystique fut chassé de Meknès avec quelques uns de ses compagnons parce que sa notoriété faisait de l'ombre à celle du sultan de l'époque. Pour survivre dans le désert ils se nourrissaient de serpents, de scorpions et de plantes. Ils ont survécus au désert et depuis ce jour les Aïssaouas ont une relation particulière avec les serpents. Dans certaines régions du Maroc (Goulmine par exemple) ils sont utilisés pour chasser les serpents qui sont rentrés dans les habitations ou pour guérir certains maux. La transe est souvent utilisée dans ce type d'intervention ainsi que la flûte qui est très importante dans leur culte car ils se réclament du soufisme populaire.
Cette confrérie est l'une des plus fermée du Maroc.

En ce qui me concerne j'ai fait deux voyages de 15 jours avec certains d'entre eux dans la partie sud Ouest du Maroc dans le désert côtier afin de voir et de m'informer un peu de leurs pratiques de chasse. Cela n'a rien à voir avec les montreurs de serpents pour les touristes. Les serpents les plus utilisés pour ce type de spectacle sont le Naja haje legionis, la Bitis arientans, la Macrovipera mauritanica, la Malpolon monspessulanus et la Coluber hippocrepis. Je vous mets quelques clichés réalisés lors de ces deux séjours. Une fois de plus je ne fais pas l'apologie des manipulations spectacles mais je m'intéresse aux différentes cultures en rapport avec les reptiles en particulier. Toutes les manipulations faites et montrées dans ces clichés ont été réalisés avec des animaux qu'ils venaient de capturés, les crochets n'ont jamais été retirés et les manipulations ont été effectuées au bout de quelques minutes après la capture, très souvent ils prenaient un thé entre la capture et les manipulations, je pense pour calmer l'animal.
Neopilina

Message par Neopilina »

Bonjour,

Ca me parle beaucoup tout ça. Les modalités de la capture sont déterminantes pour la suite.
Je capture à mains nues, avec une petite trique en bois, d'abord pour immobiliser au sol l'animal découvert, puis pour tenir à la tête à l'écart de la main qui tient l'arrière du corps. En procédant ainsi, on comprend que les individus présentant le plus de risques sont les jeunes (Petite longueur et tempérament.). Si la capture se passe "mal", dure, une fois l'animal au fond de mon seau, je sais déjà qu'il ne sera pas question de tenter quoi que ce soit avec cet individu, et de toute façon il le montre très bien. A l'inverse, si un animal se retrouve en quelques instants et en douceur au fond du seau, je ne suis pas forcément devenu de facto synonyme de violence et de danger, le comportement de l'animal sera complétement différent. Alors là j'adopte moi aussi un comportement adéquat, je ne détaille pas, mais juste un exemple.
J'ai récemment effectué 10 captures d'aspic après la découverte d'une station très riche, sur les 10, pour trois d'entre elles, parmi les plus longues, de la capture au relâcher, il n'y a pas eu une seule tentative de morsure, si je devais tenté quelque chose de "déraisonnable", ça aurait été avec ce genre d'individus.

Sinon M.m est toujours aussi caractériel. Quant à la Bitis arietans présentée, je défie quiconque d'en "faire" quoi que ce soit, cet individu est "perdu". A gauche, de face, les mâchoires sont entre-ouvertes, cet animal a déjà mordu et s'est fait mal et/ou blessé en le faisant. Le prochain être "humain" croisé payera, si elle le peut, le capital et les intérêts.

Abstraction faite de morsures d'espèces non-venimeuses, dont je me contre-fous, hormis une légère surveillance d'une éventuelle évolution septicémique, je me suis fait mordre une fois par un serpent venimeux, très exactement comme le vulgus pecus : par un serpent que je n'avais pas vu ! Belle ironie je trouve.

Editer.
Avatar du membre
Pierre-Yves
admin
admin
Messages : 3602
Enregistré le : 31 janv. 2006 14:22
Localisation : Genève, Suisse
Contact :

Message par Pierre-Yves »

@ Kodiak: très intéressant merci Serge. Une question: que font les Aissaouas de leurs captures ?
@ Neopilina ? editer ? ensuite oui la Bitis a mordu mais ce n'est pas pour autant qu'elle va s'en souvenir... les captures qui se passent disons, plus brutalement, de mon expérience, ne rend pas le serpent plus agressif... Chaque serpent a son caractère et se défend comme il peut, il suffit d'attendre: soit la fatigue, soit le stress, soit la résignation l'emporte et le calme revient. Je ne crois pas qu'un serpent soit capable de mémoriser une expérience. Après, tout est possible...
chatou74

Message par chatou74 »

F a b u l e u x =D>
Neopilina

Message par Neopilina »

Je sais de façon expérimentale qu'un serpent se souvient d'éventuelles "mauvaises" conditions de sa capture pendant au moins plusieurs jours pour ne pas dire plus. En tous cas, avec ces animaux, je ne tente rien et ils me le rappellent à tout instant.
Steph54
membre junior
membre junior
Messages : 18
Enregistré le : 14 juin 2007 23:29
Localisation : Lorraine
Contact :

Message par Steph54 »

Bonjour,
Magnifique reportage, bravo ! Et de bien belles espèces photographiées, toujours avec de belles lumières !

C'est toujours intéressant de savoir ce qu'ils font, c'est dommage qu'il y a la dérive des charmeurs de serpents, ce qui semble dramatique pour les populations de serpents des environs de Marrakech, et maintenant plus loin...

Stéphane
a+
Stéphane
Kodiak

Message par Kodiak »

Neopilina a écrit :Bonjour,
Ca me parle beaucoup tout ça. Les modalités de la capture sont déterminantes pour la suite.
Je capture à mains nues, avec une petite trique en bois, d'abord pour immobiliser au sol l'animal découvert, puis pour tenir à la tête à l'écart de la main qui tient l'arrière du corps. En procédant ainsi, on comprend que les individus présentant le plus de risques sont les jeunes (Petite longueur et tempérament.). Si la capture se passe "mal", dure, une fois l'animal au fond de mon seau, je sais déjà qu'il ne sera pas question de tenter quoi que ce soit avec cet individu, et de toute façon il le montre très bien. A l'inverse, si un animal se retrouve en quelques instants et en douceur au fond du seau, je ne suis pas forcément devenu de facto synonyme de violence et de danger, le comportement de l'animal sera complétement différent. Alors là j'adopte moi aussi un comportement adéquat, je ne détaille pas, mais juste un exemple.
J'ai récemment effectué 10 captures d'aspic après la découverte d'une station très riche, sur les 10, pour trois d'entre elles, parmi les plus longues, de la capture au relâcher, il n'y a pas eu une seule tentative de morsure, si je devais tenté quelque chose de "déraisonnable", ça aurait été avec ce genre d'individus.
Sinon M.m est toujours aussi caractériel. Quant à la Bitis arietans présentée, je défie quiconque d'en "faire" quoi que ce soit, cet individu est "perdu". A gauche, de face, les mâchoires sont entre-ouvertes, cet animal a déjà mordu et s'est fait mal et/ou blessé en le faisant. Le prochain être "humain" croisé payera, si elle le peut, le capital et les intérêts.
Pour répondre aux quelques mots concernant la Bitis arietans, c'est animal est "perdu" je ne sais pas trop ce que vous voulez dire en cela, mais ce que je peux vous dire est que l'animal n'était pas blessé et ce que vous prenez pour une blessure n'est en fait qu'un crochet pas tout à fait rentré. La Bitis a effectivement frappé dans le vide, comme très souvent pour les bitis sauf pour la Bitis gabonica qui est plus que cool quand on l'attrape tant qu'on ne lui bloque pas la tête. Le fait qu'un crochet ne se place pas correctement immédiatement après la frappe est assez fréquent sur les serpents ayant de grands crochets. Je l'ai observé lors de capture de Lachesis muta, beaucoup de Bitis nasicornis, pas mal d'espèce de crotales.
En ce qui concerne encore cette Bitis, l'un des Aïssaoua la prise dans cette position et la placé en boule sur sa tête, c'est ce que je vous répondais déjà dans une de mes réponses il y a quelques jours. D'une manière générale on a jamais intérêt à bloquer la tête d'un serpent venimeux lors de la capture surtout s'il s'agit d'un animal assez lourd et puissant car il risque de se briser les vertèbres en aval du coup.

Kodiak.
Image
Kodiak

Message par Kodiak »

Pierre-Yves a écrit :@ Kodiak: très intéressant merci Serge. Une question: que font les Aissaouas de leurs captures ?
@ Neopilina ? editer ? ensuite oui la Bitis a mordu mais ce n'est pas pour autant qu'elle va s'en souvenir... les captures qui se passent disons, plus brutalement, de mon expérience, ne rend pas le serpent plus agressif... Chaque serpent a son caractère et se défend comme il peut, il suffit d'attendre: soit la fatigue, soit le stress, soit la résignation l'emporte et le calme revient. Je ne crois pas qu'un serpent soit capable de mémoriser une expérience. Après, tout est possible...

Pierre-Yves, les Aïssaouas sont des chasseurs donc ils revendent aux montreurs de serpents leurs captures pour faire des spectacles aux touristes. Certains font aussi de temps en temps des spectacles mais c'est assez rare. Je n'en connais que deux qui font cela en plus de la chasse.
Pour une entrecôte je t'expliquerais le système de partage de l'argent entre les montreurs n'ayant pas leurs serpents et les montreurs ayant leurs propres serpents, ainsi que le système de boites aux lettres en bordure du désert afin que chaque Aïssaouas sachent où se trouvent les autres chasseurs et toutes les petites pièces en bordure de la place Jemaa el fna où les charmeurs vont se reposer autour d'un thé et fumer un peu.

Lors de ces deux séjours j'ai été dans tous leurs endroits entre la place et le désert et ils m'ont accepté, j'apprécie beaucoup ces personnes malgré que leur activité ont décimé en grande partie certains populations de serpents.

Kodiak.
Image
Répondre