Les forêts qui bordent notre commune sont traversées par de nombreux chemins
forestiers et délimitées parfois par des étendues marécageuses. Les beaux jours
sont bientôt là et, si vous appréciez les promenades dans la nature, n'hésitez
pas à partir à la découverte de l'éveil forestier, écouter les oiseaux chanter,
humer les parfums du sous-bois et de certaines fleurs qui ne tarderont pas à
éclore. Revenez régulièrement observer le développement des bourgeons et du
tapis floral, la confection des nids d'oiseaux et leur inlassable manège
associé, examinez le sol, reconnaissez les différentes empreintes de sanglier,
chevreuils, cerfs, mais surtout, penchez-vous au dessus des ornières remplies
d'eau faites par les tracteurs et autres engins de travail.
Si il y a de l'eau et que celle-ci est
claire, vous aurez certainement la surprise d'apercevoir furtivement quelque
chose bouger et créer un petit nuage de vase; intrigué, curieux et patient, vous
resterez accroupi et vous ne tarderez pas à découvrir les auteurs de ce ballet
aquatique. Votre première réaction sera de penser à des salamandres: il n'en est rien car la
salamandre n'habite pas notre commune et est exclusivement terrestre.
Vous êtes donc en présence d'un batracien urodèle (qui possède une queue
contrairement au batracien anoure qui en est dépourvu), de la famille des
salamandridés, que tout le monde ou presque connaît sous le nom de triton.
L'espèce qui nous intéresse est le triton alpestre (batracien) ou Triturus alpestris en
latin. Ce discret animal s'observe déjà, suivant la température, en février mais
plus activement entre mars et mai dans tous les points d'eau tels les ornières,
les fossés, les étangs, les marais, en plaine comme en altitude jusqu'à 2400
mètres. Il recherche les eaux plutôt fraîches et ombragées, et peut parfois se
trouver dans les piscines en fin d'hiver.
Le mâle arbore des couleurs nuptiales magnifiques qui font de lui le plus
bel urodèle de notre département: il est bleu vif, avec des taches noires sur
les flancs et la ligne vertébrale, un ventre orange et une crête peu développée.
La femelle, plus grande, se montre sobre dans ses atouts (camaïeux de gris brun
sur le dos et orange sous le ventre); il faut dire qu'elle n'a nul besoin de
séduire, ce rôle étant dévolu aux mâles par définition tant ils sont nombreux.
La concurrence est donc particulièrement rude.
Le bal des amours est assez spectaculaire: la femelle, lors de ses
déplacements dans l'eau, attire immanquablement les mâles environnants qui se
placeront alors face à face pour une parade d'intimidation. Le plus fort et le
plus séduisant se positionnera latéralement à sa promise, effectuera une sorte
de danse autour d'elle, agitera la queue afin de provoquer un léger courant d'eau qui la stimulera à stopper
son déplacement. Le mâle déposera alors son spermatophore (petite capsule qui
contient les spermatozoïdes) qui sera aussitôt absorbé par les lèvres cloacales
de la femelle; les spermatozoïdes iront alors féconder les ovules mais pourront
également rester vivants dans un organe nommé spermathèque et ce, deux années
durant.
Les oeufs, au nombre de 150 environ, seront déposés par la femelle sous des
plantes aquatiques et écloseront après une dizaine de jours. Le développement
larvaire (qui durera de 3 à 4 mois) commencera alors, avec ses dangers et ses
métamorphoses. Le principal danger viendra de la prédation effectuée sur les
larves par les insectes aquatiques, les poissons, la dessiccation du
milieu ambiant et la pollution. Les différentes phases de la métamorphose
mettront à jour l'apparition successive des membres antérieurs puis postérieurs,
le développement et la régression des branchies, la différentiation des proies
intervenant au fur et à mesure de cette évolution (plancton puis larves et vers
divers). De l'oeuf au juvénile ressemblant à l'adulte ne se seront écoulés que
trois à quatre mois, sauf pour les individus d'altitude qui, à cause de la
température, adopteront un cycle de reproduction et de développement biennal. Dans ce cas, la
néoténie (faculté de se reproduire tout en présentant les caractéristiques de la
phase larvaire) peut être fréquente. Les jeunes tritons métamorphosés mesurent
entre 4 et 5 centimètres, quittent le milieu aquatique en fin d'été pour se
réfugier dans des endroits frais et humides à proximité immédiate de leur lieu
de naissance.
Les tritons adultes quittent généralement l'eau vers le mois de juin pour mener
une vie terrestre plus discrète jusqu'au printemps suivant.
Le régime alimentaire du triton consiste principalement en larves
d'insectes, vers de vase, oeufs de grenouilles ou de crapauds ainsi que leurs
têtards. Sa longévité peut atteindre une quinzaine d'année en captivité. Ses
prédateurs potentiels sont les couleuvres, les poissons et certains oiseaux.
Mâle (à gauche), femelle et juvénile en phase terrestre |